Bouillons de lectures

Faut-il qu'un livre me bouleverse pour que je renoue avec le jeté d'impressions.

Alexis est fils de boucher, une obsession pour lui. Un complexe d'infériorité qu'il transforme bassement en violence. Vis-à-vis de lui, des autres. Il maltraite sa vie tout entière. C'est un plongeon dans la peau d'un homme dur, d'un homme perdu, à la limite de la raison parfois. Aux origines de ses dysfonctionnements. Ses relations avec les femmes. Son rapport à lui-même. Une immersion crue et intense. Du sexe sans vulgarité. La vérité toute nue.

Jean-Louis est un écrivain, humoriste et réalisateur de télévision né à Arras le 19 décembre 1938.
Jean-Louis est un proche de Pierre Desproges, Jean-Louis est marié, et il a 3 enfants.

Jean-Louis a deux fils polyhandicapés.

Il les raconte de manière bouleversante, de manière acide. Une sacrée dose d'humour noir pour exorciser la douleur de ne pas voir grandir ses enfants. De les voir souffrir. De les voir mourir.

Un témoignage choquant et controversé.

APrès avoir écrit ses enfants, Jean-Louis Fournier écrit son père. Un médecin de campagne atypique qui, par certains côtés, ressemble au Zubial

d'Alexandre JArdin. Un père tant admiré que détesté.

Le témoignage est touchant, moins que Où on va, papa?

A lire dans le métro.

J'ai lu ce livre suite à la critique de ma cybercopine Vivement , histoire de voir si ce qu'il soulevait en elle se soulevait en moi.
Histoires de frères, de dysmorphophobie et d'estime de soi, d'artiste allumé... j'ai été aussi soulevée, écoeurée, que Vivement, mais étrangement le côté "interrogation sur la nature de l'art" m'est apparu bien secondaire face à la question fondamentale de l'être. Qu'est-ce qu'être ? comment être ? qui être ? la si néfaste prépondérance de l'avis d'autrui dans la construction du "moi"... comme des boomerang qui me sont revenus dans la figure à la lecture de ce bouquin, questions essentielles, aliens tant dans le ventre que dans la tête.

Pourtant, pourtant, si Schmitt a écrit des ouvrages uniques, comme Oscar et la dame rose ou La part de l'autre, je rapproche celui-là d'une soupe Amélie-Nothombienne à la Acide sulfurique (ndlr: télé-réalité dans un camp de concentration), dérangeante, choquante,mais qui ne bouleverse ni la littérature, ni la philosophie.

C'est l'histoire d'un mec, il survit à un crash d'avion. C'est le seul, le mec. Il hallucine grave. ALors il fait une enquête pour savoir la raison du comment-ça-se-fait-non-mais-dis-donc-comment-ça-se-fait. Parallèlement se passent des trucs chelou dans la ville, des morts étranges, des histoires qui font peur, des revenants et tout et tout.

Bon, voilà, ça casse pas trois pattes à un canard qui mousse mais ça se lit.

C'est une danseuse. Une maman. Une femme. Qui avance dans sa vie, dans sa tête et dans son corps. Une femme qui fait des choix, ceux qu'en général on ne fait pas.

C'est une auteure qui invente un style, enfin. Qui joue avec la ponctuation. Pour me faire vivre ses émotions.

C'est un livre nouveau, une douceur qui une claque. Je vote pour.

Ce livre est décidément bien étrange. Fantastique. J'avais eu vent de Huckleberry Finn et autre Tom Sawyer (bon, d'accord, surtout par les dessins animés), et je m'attendais à un truc du genre, un conte à morale  planté dans les Etats Unis ruraux du XIXème siècle... bah pas du tout.

Dans l'Autriche reculée, un château isolé, des imprimeurs en quasi autarcie. Un demi héros, August, insipide. Et un étranger. N°44. Il arrive et la gentiellette historiette plonge dans un maëlström de loufoquerie, de magie, de folie!... la même impression, entre deux eaux quand je m'endors, d'avoir un pied dans la réalité, un autre dans les songes... c'est ça: la progression de ce livre est une métaphore de mon endormissement... quel étrange, quel désarconnement que de dormir éveillée...

L'homme dé devient maître dans l'art des choix en s'y soustrayant... il donne le pouvoir de la décision aux dés. CE faisant, il fait fi de toute la culpabilité qu'on peut éprouver en faisant un mauvais choix, et laisse sa vie soumise au hasard.

Luke Rhinehart développe cette théorie bien huilée, tellement bien que l'idée nous traverse de... lancer les dés... une fois, juste une fois... s'y soumettre sans protestation et leur laisser tout le poids de la difficulté des décisions. Des dé-cisions. Rhinehart botte le cul de tout esprit conformiste, moral ou sage pour voler dans les sphères de la folie libératrice. Très perturbant.

Un roman écrit comme un morceau de jazz, phrases courtes, rythme entraînant, et on ne le lâche pas quand on l'ouvre... une histoire simple qui se joue dans nos oreilles autant que devant nos yeux: l'homme abîmé, déconnecté de lui-même, renoue vingt ans après avec sa passion: le piano, et s'en découvre une autre: une femme.

C'est du fantastique, du n'importe quoi, du Myasaki sans images animées, des personnages fous, des événements déjantés, des mots, des mots, des mots... un voyage initiatique, maïeutique, pour Kafka, 15 ans, qui fuit son berceau, entraîne avec lui et malgré lui un vieux bonhomme à moitié fou, un camionneur qui découvre la musique classique, une bibliothécaire amoureuse d'un fantôme, un assistant hermaphrodite homosexuel... j'ai été ballotée dans ces nouveaux mondes, entre deux, où je me suis un peu plus trouvée. Enfin, je ne sais pas, quoi. Je tourne la 637ème et dernière page des étoiles dans les yeux.